
Source: https://pixabay.com/
Introduction
C’est un arrêt de la Cour de justice de l’Union européenne qui était attendu…
Mardi dernier, la Grande Chambre de la Cour a décidé que la saveur d’un produit alimentaire (son goût) ne peut pas être protégée par le droit d’auteur.
Les références de cette affaire sont les suivantes : C‑310/17, Levola Hengelo BV contre Smilde Foods BV; et l’arrêt du 13 novembre 2018 est disponible ici.
Les faits à l’origine du litige
Le fabricant d’un fromage à tartiner à la crème fraîche et aux fines herbes accusait un autre opérateur économique de vendre à des supermarchés un formage à tartiner qui avait la même saveur (le même goût) et qui portait donc atteinte à ses droits d’auteur sur cette saveur.
Les juridictions néerlandaises ont été saisies de ce litige et la cour d’appel (le Gerechtshof Arnhem-Leeuwarden) a estimé devoir interroger la Cour de justice de l’Union européenne sur la possibilité de protéger par le droit d’auteur une saveur alimentaire.
Les arguments des parties à cet égard étaient, en effet, diamétralement opposés:
- Selon le fabricant du fromage à tartiner qui revendiquait des droits d’auteur « la saveur d’un produit alimentaire peut être qualifiée d’œuvre littéraire, scientifique ou artistique protégée au titre du droit d’auteur. (…) par analogie, notamment, sur l’arrêt du 16 juin 2006 du Hoge Raad der Nederlanden (Cour suprême des Pays-Bas), Lancôme (NL:HR:2006:AU8940), dans lequel cette dernière juridiction a admis, en principe, la possibilité de reconnaître un droit d’auteur sur l’odeur d’un parfum » (§22 de l’arrêt);
- Selon l’opérateur économique accusé de contrefaçon, « la protection des saveurs n’est pas conforme au système du droit d’auteur, celui-ci visant uniquement les créations visuelles et auditives. Par ailleurs, l’instabilité d’un produit alimentaire et le caractère subjectif de la perception gustative feraient obstacle à la qualification d’une saveur d’un produit alimentaire comme œuvre protégée au titre du droit d’auteur. De surcroît, les droits exclusifs de l’auteur d’une œuvre de propriété intellectuelle et les limitations auxquelles ces droits sont soumis seraient, en pratique, inapplicables aux saveurs » (§23 de l’arrêt).
Continue reading…