L’article 805 du Code judiciaire a été modifié

Présentation de la réforme

Les règles procédurales en matière de défaut viennent d’être, très légèrement, modifiées.

Cette modification est intervenue par une loi du 7 juin 2022 “modifiant l’article 805, alinéa 2, du Code judiciaire en ce qui concerne le défaut”.

Cette loi ne contient que deux articles et, à vrai dire, seul l’article 2 nous intéresse.

Celui-ci dispose que :

Dans l’article 805, alinéa 2, du Code judicaire, les mots  « au cours de l’audience où le défaut a été requis » sont remplacés par les mots « avant que la cause ne soit prise en délibéré »”.

Pour rappel, l’alinéa 2 de l’article 805 du Code judiciaire concerne la possibilité de rabattre le défaut et de poursuivre la procédure contradictoirement.

Auparavant, il n’était possible de rabattre le défaut que lors de l’audience où ce défaut avait été requis.

Désormais, il sera possible de rabattre le défaut même postérieurement à l’audience où il a été requis, pour autant que cela intervienne “avant que la cause ne soit prise en délibéré”.

La seule modification apportée par cette loi du 7 juin 2022 concerne donc le moment où le défaut peut être rabattu.

De façon consolidée, le nouvel article 805, alinéa 2, du Code judiciaire se lit comme suit :

“Le défaut sera rabattu et l’instance poursuivie contradictoirement si les parties le sollicitent conjointement avant que la cause ne soit prise en délibéré”.

L’accord de toutes les parties est toujours nécessaire

L’accord de toutes les parties est toujours nécessaire pour rabattre le défaut (“si les parties le sollicitent conjointement”).

Impossible donc de rabattre le défaut, même ultérieurement à l’audience où il a été requis, sans l’accord de la partie qui a requis le défaut !

De ce point de vue, il n’est pas certain que cette réforme soit efficace (la partie qui a requis le défaut pouvant refuser de rabattre le défaut qu’elle a requis).

Le cas de figure qui a inspiré cette modification législative parait peu fréquent en pratique

Par ailleurs, les travaux préparatoires semblent viser la situation où plusieurs audiences successives ont lieu et où le “défaillant” comparaîtrait soudainement à une audience ultérieure :

“Aussi la présente proposition de loi vise-t-elle à modifier l’article 805 du Code judiciaire afin que les parties aient la possibilité de rabattre le défaut, d’un commun accord, au cours de la première audience suivant celle où le défaut a été prononcé et où la partie contre de laquelle ce défaut a été prononcé comparaît bel et bien (en personne ou par l’intermédiaire d’un avocat)” (Doc 55-0353/001, Exposé des motifs, p. 3).

Cette situation est, à mon sens, loin d’être fréquente. En effet :

  • Si la partie qui a comparu requiert le défaut, le juge doit statuer (par défaut), c’est-à-dire prononcer un jugement (pour rappel, l’office du juge statuant par défaut est réglé par l’article 806 du Code judiciaire). Dans ce scénario, il n’y aura donc pas d’audience ultérieure à laquelle le “défaillant” aura l’occasion de comparaitre pour demander de rabattre le défaut.
  • Même à supposer qu’une remise intervienne après l’audience où le défaut a été requis – par exemple parce que le tribunal souhaite entendre la partie comparante et qu’il n’en a pas le temps à l’audience d’introduction -, le “défaillant” ne sera pas au courant de cette audience de remise ; comment pourrait-il, dès lors, subitement comparaitre à cette audience de remise dont il n’a pas connaissance ? (voy. cependant Bruxelles (1ère ch. bis), 8 décembre 2005, J.T., 2006, n° 6211, p. 77)
  • Quant à l’article 803 du Code judiciaire, qui permet la reconvocation du défaillant à une audience ultérieure, il ne s’applique que lorsque le défaut n’a pas été requis. Dans ce scénario, il ne sera donc pas non plus question de rabattre le défaut, puisque par définition la procédure n’est pas par défaut, mais contradictoire.

Au vu de ce qui précède, je ne suis pas certain que cette – très légère – modification législative révolutionnera la pratique procédurale en matière de défaut ! Cependant, cela permettra un peu plus de souplesse dans les cas où cela s’avèrera nécessaire.

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Frédéric Lejeune, avocat au barreau de Bruxelles