‘marijuanamarlboros.com’, un bel exemple de cybersquatting
Je vous parlais récemment de noms de domaine et de cyberquatting (voyez ici).
Un cas récent, Philip Morris USA Inc. v. Garib Karapetyan, illustre parfaitement les trois conditions nécessaires pour pouvoir conclure au cybersquatting.
Les faits
Philip Morris USA Inc., qui fabrique et vend des cigarettes sous la célèbre marque MARLBORO depuis des décennies et qui a enregistré le nom de domaine <marlboro.com>, s’aperçoit que depuis le 11 juin 2014 un tiers a enregisté le nom de domaine <marijuanamarlboros.com>.
Philip Morris introduit alors une plainte auprès du Centre d’arbitrage et de médiation de l’OMPI (l’Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle; WIPO en anglais).
En droit
Saisi de cette plainte, le panéliste Robert A. Badgley examine d’abord s’il y a identité ou similarité portant à confusion entre les droits antérieurs de Philip Morris (c’est-à-dire la marque MARLBORO) et le nom de domaine litigieux (1ère condition du cybersquatting). Selon le panéliste, le risque de confusion ne fait aucun doute car (i) le nom de domaine inclut la célèbre marque MARLBORO dans son entièreté et (ii) le terme « marijuana » pourrait aggraver la confusion dans le chef du consommateur, dès lors que celui-ci pourrait croire, à tort, que Philip Morris, spécialisé dans les produits à fumer, serait désormais actif dans le commerce de cigarettes de marijuana sous la marque MARLBORO. Dans ces circonstances, l’adjonction du terme « marijuana » à « marlboro », dans le nom de domaine litigieux, n’est pas du tout de nature à atténuer le risque de confusion. C’est, selon le panéliste, précisément l’inverse.
Le panéliste constate ensuite que le titulaire du nom de domaine <marijuanamarlboros.com> n’a aucun droit ni intérêt légitime sur le nom de domaine litigieux (2ème condition du cybersquatting). En effet, ce titulaire n’a pas été autorisé par Philip Morris à utiliser le signe MARLBORO, ni à titre de nom de domaine ni autrement. Au demeurant, ce titulaire n’a fourni aucune explication ni aucune preuve de ce qu’il aurait utilisé ce nom de domaine litigieux ou un nom correspondant à celui-ci, en relation avec une offre, faite de bonne foi, de produits ou de services.
Enfin, le panéliste estime que le titulaire du nom de domaine <marijuanamarlboros.com> a enregistré et utilisé le nom de domaine litigieux de mauvaise foi (3ème condition du cybersquatting). En effet, selon le panéliste, il est très vraisemblable que le titulaire du nom de domaine avait, à l’esprit, la marque MARLBORO de Philip Morris quand il a enregistré son nom de domaine. Au demeurant, l’objectif du titulaire du nom domaine litigieux était de toucher des revenus en relation avec les hyperliens placés sur la page à laquelle renvoyait le nom de domaine, ce qui est constitutif d’un comportement de mauvaise foi.
Conclusion
En conséquence, l’enregistrement abusif du nom de domaine <marijuanamarlboros.com> a été reconnu et ce nom de domaine a été transféré à Philip Morris.
Frédéric Lejeune, avocat au barreau de Bruxelles