Une plateforme peut-elle modifier les vidéos qu’elle héberge ?

Image by Raphael Silva from Pixabay

La presse a récemment révélé que YouTube aurait modifié des vidéos sans l’accord des créateurs de celles-ci et sans même les prévenir.

Je vous renvoie, par exemple, à un article de la RTBF intitulé YouTube fait appel à l’IA pour « améliorer » des vidéos, sans prévenir les créateurs de contenu.

La question se pose donc : à supposer qu’elle soit avérée, une telle pratique est-elle légale ?

A priori, la réponse est négative (au regard du droit d’auteur belge, en tout cas).

En effet, l’auteur est le seul habilité à modifier son oeuvre ou à en autoriser la modification. Il s’agit du droit exclusif d’adaptation. En droit belge, ce droit est prévu par l’article XI.165, §1er, alinéa 2, du Code de droit économique.

Personne ne peut donc modifier une oeuvre, sans l’accord préalable de l’auteur (ou des auteurs, s’ils sont plusieurs), à peine de commettre un acte de contrefaçon.

Par ailleurs, l’auteur dispose d’un droit moral à l’intégrité de son oeuvre. En droit belge, ce droit est consacré par l’article XI.165, §2, alinéa 6, du Code de droit économique :

« [L’auteur] dispose du droit au respect de son oeuvre lui permettant de s’opposer à toute modification de celle-ci ».

Au plan strictement légal, il n’est donc pas possible pour une plateforme de modifier les vidéos qu’elle héberge sans l’accord préalable des créateurs de celles-ci.

Les auteurs disposent d’au moins deux fondements juridiques pour s’y opposer : (i) le droit d’adaptation et (ii) le droit moral à l’intégrité de l’oeuvre.

En pratique, toutefois, il faudra encore vérifier les conditions d’utilisation de chaque plateforme concernée, pour voir notamment (i) si elles contiennent des dérogations contractuelles s’agissant du droit d’adaptation et (ii) quel est le droit applicable prévu par ces conditions.

La réponse est donc assez complexe et nuancée (en pratique, en tout cas).

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Frédéric Lejeune, avocat au barreau de Bruxelles