Signification d’une citation à comparaître en justice par Twitter !

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Il y a quelques années, quand j’étais encore étudiant, je me rappelle avoir entendu Hakim Boularbah, qui donnait le cours de droit judiciaire privé à l’ULB, nous dire – sur le ton de la plaisanterie – “peut-être qu’un jour on pourra citer quelqu’un en justice par Facebook ou Twitter”.

9 ans plus tard, ce jour semble être arrivé… aux Etats-Unis, en tout cas.

Un tribunal californien a, en effet, autorisé la signification d’une citation à comparaître par le biais de Twitter (St. Francis Assisi v. Kuwait Finance House, Kuveyt – Turk Participation Bank Inc., Hajjaj Al Ajmi).

Les faits de cette affaire peuvent être résumés comme suit :

  • Le demandeur veut assigner en justice différentes personnes morales et une personne physique, afin d’obtenir la réparation de dommages en lien causal avec le financement d’organisations terroristes et l’assassinat de chrétiens en Irak et en Syrie.
  • Le demandeur ne parvient pas à signifier la citation à comparaître à la personne physique concernée, qui est koweitienne. En réalité, il n’est pas possible de localiser cette personne.
  • Le demandeur saisit donc le tribunal pour lui demander d’autoriser la signification par un “moyen alternatif” au sens de l’article 4 (f) (3) de la Federal Rule of Civil Procedure ; en l’occurence, le moyen alternatif sollicité est le réseau social Twitter.

Le tribunal fait droit à cette demande de signification via Twitter, après avoir constaté :

  • l’impossibilité de localiser le défendeur, personne physique koweitienne (“St. Francis attempted to locate al-Ajmi through a skip trace; however, St. Francis was unable to determine al-Ajmi’s whereabouts”) ;
  • que cette personne physique a un compte Twitter actif (“Al-Ajmi has an active Twitter account and continues to use it to communicate with his audience”) ;
  • qu’une signification par Twitter est appropriée et n’est interdite par aucune convention internationale (“Service by Twitter is not prohibited by international agreement with Kuwait”) ;
  • que la jurisprudence américaine a déjà consacré la possibilité de signifier par e-mail et par Facebook (“Courts have authorized service by social media in similar cases. (…) The court granted service by email and Facebook because these channels were reasonably calculated to notify the defendants and were not prohibited by international agreement. Id. at 3-4. The email addresses and Facebook accounts were registered under the defendants’ names and used frequently for communication. Id.at 4.”).

Avant de voir, en Belgique, la communication d’un acte de procédure (a fortiori une citation en justice) par e-mail ou via un réseau social, il va, à mon avis, encore falloir attendre un certain temps.

On commence seulement à pouvoir déposer, via Internet, nos actes de procédure auprès des cours et tribunaux (e-Deposit). C’est tout dire !

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Frédéric Lejeune, avocat au barreau de Bruxelles